Opinion Marché de l’énergie , Marchés et régulation , Régulation

Soyons sincères

Opinion sur la tarification du réseau

23.08.2017

Dans notre société, l’électricité est un bien essentiel, tout comme l’eau. Elle doit être disponible 365 jours sur 365, 24 heures sur 24. Et ce, indépendamment de la demande et des prix de négoce. S’ajoutent à cela des horizons d’investissement très longs et à forte intensité de capital du côté des producteurs, combinés à une faible gérabilité à court terme des quantités de production. Du côté des consommateurs, il y a, dans les faits, une obligation de consommation et, ainsi, une élasticité des prix extrêmement faible. C’est pourquoi la production d’électricité ne peut se soumettre à aucune logique de marché, car les règles classiques du marché, selon lesquelles c’est le prix qui gère l’offre et la demande, ne fonctionnent pas. La libéralisation sur le marché européen de l’électricité, portée par une idéologie et non par l’économie, a donc également mené à la situation absurde dans laquelle les prix du négoce ont été découplés des coûts de revient et reliés, à la place, au prix du gaz, aux prix du CO2, etc. Cela va à l’encontre du système, car un prix du marché reflète toujours les coûts de production réels – autrement, les prestataires ne produiraient pas plus (ou moins). Ce qui, pour l’électricité, n’est évidemment pas possible.

Conséquence : suite à la vague de libéralisation, toute l’Europe applique de nouveaux tarifs à l’électricité – par des moyens détournés, qu’on appelle « rétribution à prix coûtant du courant injecté », « prime de marché » ou « prix de reprise garantis » sur des décennies. La raison à cela est simple : à défaut, il n’y aurait ni investissements, ni garantie de la sécurité d’approvisionnement. Et là, oups ! On découvre soudain que le « marché » a besoin d’une quantité (prévue) administrée de courant électrique pour la sécurité d’approvisionnement et pour des raisons de technique du réseau. Pour cela, on conçoit maintenant des marchés de capacité. Le principal est que l’on puisse faire comme si on jouait au marché, même si dans les faits, on revient au système tarifaire extrêmement simple et efficace qui a fait ses preuves pendant des décennies. Finissons par admettre cela une bonne fois pour toutes ! Ensuite, nous pourrons discuter d’un système tarifaire judicieux – actuellement, il s’agit de savoir si nous appliquons la méthode du prix moyen ou celle des coûts de revient (je trouve la seconde nettement meilleure). C’est la seule manière de générer la sécurité d’investissement et, par là même, la sécurité d’approvisionnement nécessaire. Encore une chose : arrêtons enfin d’appeler « subvention » la différence entre un prix de négoce contraire au système et les coûts de revient réels. En effet, cela nous aiderait à placer nos « modèles de marché électrique » mentaux dans le bon cadre (régulatoire).

Auteure
Jacqueline Badran

est Conseillère nationale PS/ZH.

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