Article Capteurs , Efficacité énergétique , Éclairage

Un éclairage qui s’adapte à la situation

Le projet Radar-LED

01.11.2019

Environ 12% de la consommation suisse d’électricité revient à l’éclairage. Or, de nombreuses lampes sont allumées sans que personne n’en profite. Il est possible d’éviter cela grâce à des luminaires qui varient leur luminosité de manière autonome. Une jeune entreprise zurichoise a conçu une solution intégrant un capteur radar qui contrôle les tubes LED en fonction des besoins.

Dans notre vie quotidienne, de plus en plus de choses semblent se dérouler comme par magie: les portes coulissantes s’ouvrent à notre approche. L’escalator démarre quand on pose le pied sur la première marche. La lumière s’allume quand on veut ouvrir le soir la porte de sa maison ou entrer dans le garage. Lorsque les objets réagissent à notre présence, il s’agit souvent de l’œuvre de détecteurs de mouvement. Depuis quelques temps, cette technique est également utilisée dans un passage souterrain réservé aux piétons et aux cyclistes sur la promenade de la Sihl, dans le quartier Enge de la ville de Zurich. L’éclairage est tamisé tant que personne ne s’y trouve. Lorsqu’un piéton ou un cycliste s’approche, les luminaires LED passent à leur intensité maximale, puis retournent à l’état tamisé lorsque la personne a quitté le passage souterrain.

«En remplaçant les anciens tubes fluorescents par des tubes LED, la consommation moyenne est passée de 53 W à 19 W, à intensité lumineuse constante. En dotant en outre les tubes LED d’une commande radar intelligente, nous réduisons encore la consommation moyenne de 19 W à 6 W, ce qui correspond à une réduction drastique de 90% par rapport aux tubes fluorescents», explique Patrik Deuss. À 27 ans, il est directeur de la jeune entreprise LEDCity AG qui a développé l’éclairage innovant pour le passage souterrain de Zurich. En tant que responsable de l’éclairage public de la ville de Zurich, EWZ (Elektrizitätswerk der Stadt Zürich) a également participé au projet. Le système d’éclairage a fonctionné parfaitement pendant le semestre d’hiver 2018/19.

D’un travail de Bachelor à une nouvelle idée commerciale

L’entreprise LEDCity existe depuis 2017. Basée dans le parc technologique de Zurich, elle compte aujourd’hui huit collaborateurs âgés de 25 à 52 ans: des développeurs, des constructeurs, mais aussi des vendeurs. Contrairement à de nombreuses start-up, LEDCity affiche déjà des chiffres noirs, deux ans après sa création. C’est dans l’esprit de Patrik Deuss qu’a germé l’idée commerciale en 2016. Il terminait alors, avec son travail de Bachelor, ses études en technique de l’énergie et de l’environnement à l’Université des sciences appliquées de Zurich (ZHAW), à Winterthur. Selon ses termes, il souhaitait «exploiter judicieusement» ses nouvelles connaissances. Avec une autre étudiante, ils ont doté un tube LED existant d’une commande, de sorte qu’il ne soit allumé que lorsque quelqu’un se trouve à proximité. Un modèle fonctionnel a démontré la faisabilité technique et le potentiel d’économie énergétique de l’idée.

En 2017, Patrik Deuss s’est associé à Florian Gärtner. Celui-ci a suivi une formation d’ingénieur en électrotechnique à la Haute école spécialisée du nord-ouest de la Suisse (FHNW), et travaillait depuis à l’Institut Paul Scherrer (Villigen/AG) dans le domaine de la technologie à haute fréquence. Ensem­ble, ils ont fondé la start-up et continué de développer le modèle fonctionnel conçu à la ZHAW, jusqu’à ce qu’il soit prêt pour la commercialisation. Au cours de l’été 2017, ils ont testé une première version du tube LED intelligent, avec le soutien de l’Office fédéral de l’énergie, dans un passage souterrain pour piétons de Zurich. Un an plus tard, la version améliorée était installée dans le passage souterrain réservé aux piétons et aux cyclistes dans le quartier Enge, à Zurich.

Adaptés aux douilles existantes

Les tubes LED à commande autonome ont trouvé entre-temps différents champs d’application. Ils éclairent désormais les couloirs et les cages d’escalier de la Haute école d’art à la Toni-Areal de Zurich, des corridors souterrains de l’ETHZ, ainsi que des parkings à Laax (GR) et à l’aéroport de Zurich. La commande de l’éclairage avec des détecteurs de mouvement n’est toutefois pas une nouveauté en soi. L’aspect innovant des tubes LED autonomes de LEDCity réside dans le fait que chaque tube dispose de sa propre commande radar qui règle son intensité lumineuse en fonction des besoins. L’éclairage est ainsi adapté sur de plus petites surfaces et l’on peut se passer du détecteur de mouvement séparé, comparativement moins sensible, ainsi que de son câblage.

Les développeurs mentionnent un avantage supplémentaire, à savoir la convivialité d’utilisation: les tubes LED autonomes peuvent être montés dans des douilles existantes destinées aux tubes fluorescents. Pour cela, il suffit au préalable de démonter le ballast qui allume le gaz d’éclairage dans le tube fluorescent. La simplicité du système paraît convaincante: une entreprise de transports publics suisse s’intéresse aux tubes LED à commande radar pour éclairer les quais la nuit, quand ils ne sont que peu fréquentés. LEDCity négocie aussi un contrat global avec un détaillant suisse, incluant les bureaux ainsi que les locaux de production, d’entreposage et de vente. «Les systèmes permettant de réaliser des économies d’énergie sont très demandés. Un marché intéressant s’ouvre à nous», s’enthousiasme Patrik Deuss.

Application envisageable dans le facility management

Les tubes LED autonomes de la première génération n’étaient d’abord équipés que d’un radar qui réglait la luminosité des tubes en fonction des besoins. Ceux de la seconde génération sont capables de communiquer entre eux par Bluetooth. Cela représente un avantage pour les usagers plus rapides, comme les cyclistes: si chaque luminaire LED est contrôlé uniquement par son propre capteur radar, il arrive qu’un passage souterrain pour vélos ne s’éclaire pas suffisamment vite. La situation est différente lorsque les luminaires LED peuvent communiquer: dans ce cas, tous les tubes LED adjacents passent à leur intensité lumineuse maximale dès que le radar du premier d’entre eux détecte le cycliste. Même si cela ne semble pas absolument nécessaire dans la situation décrite ci-dessus, tous les tubes LED sont dotés par défaut d’un radar. Cela permet d’assurer la commande optimale de chaque luminaire, même dans les situations complexes (par exemple dans les parkings).

Afin de créer de nouveaux domaines d’application pour les luminaires LED, la deuxième génération est dotée de capteurs supplémentaires, par exemple pour la température et l’humidité. Les données relatives à la lumière, la température et l’humidité peuvent alors être transmises à un serveur central. La transmission est réalisée, entre autres, par le biais du réseau LoRa de Swisscom conçu pour la transmission de petites quantités de données, avec lequel l’entreprise suisse de télécommunications veut faciliter le développement de l’Internet des objets et des smart cities. Les données d’éclairage (on/off) fournissent aux exploitants d’installations une vue d’ensemble du fonctionnement de chaque luminaire, ce qui permet un remplacement rapide en cas de défaut. Les données relatives à la température et à l’humidité pourraient à l’avenir permettre de nouvelles applications, par exemple dans le domaine du facility management. Grâce à ces données, le service d’entretien d’un bâtiment peut déduire approximativement le nombre de personnes ayant utilisé une cage d’escalier et adapter le cycle de nettoyage en conséquence. Les jeunes entrepreneurs zurichois souhaitent également aborder à moyen terme l’équipement des tunnels routiers, tout en sachant que ce secteur leur réserve encore une série d’obstacles techniques et réglementaires.

Amortissement sur deux ans

Il sera intéressant de voir comment la nouvelle technologie d’éclairage va continuer à se développer et faire ses preuves sur la durée. La propagation des tubes LED autonomes devrait dépendre, notamment, de la rentabilité. Un tube LED intelligent à 90 CHF est nettement plus cher qu’un tube fluorescent (environ 8 CHF). Les économies d’électricité compensent cependant largement cet inconvénient. Les jeunes entrepreneurs estiment les économies réalisées en remplaçant un tube fluorescent classique par un tube LED autonome à environ 415 kWh par an et en déduisent, avec un tarif de 19 ct/kWh, une économie annuelle de 79 CHF. Les frais d’acquisition d’un tube autonome seraient ainsi amortis dans un délai d’un à deux ans grâce aux économies d’électricité réalisées. «Pour nos luminaires LED, nous offrons une garantie qui s’étend sur la durée de l’amortissement financier. Ainsi, le client ne prend aucun risque», précise Patrik Deuss au sujet du modèle d’affaires de LEDCity. Il rappelle également la durée de vie nettement plus longue des tubes LED (supérieure à 50'000 h) par rapport aux tubes fluorescents (13'000 h).

«À mon avis, un jour, tous les luminaires deviendront intelligents», déclare Patrik Deuss. Si l’avenir donne raison au fondateur d’entreprise zurichois, plus personne ne devra dès lors se préoccuper de l’extinction des lumières, du moins pas dans le but d’économiser de l’énergie.

Littérature complémentaire

  • Le rapport final du projet «Entwicklung einer energieeffizienten Beleuchtung für Unterführungen – Autonome LED-Röhren» peut être téléchargé ici.
  • D’autres articles spécialisés à propos de projets phares, de recherche, pilotes et de démonstration relatifs aux technologies de l’électricité peuvent être consultés ici.


Dr Men Wirz ({{email_open::men.wirz@bfe.admin.ch}}men.wirz@bfe.admin.ch), responsable du programme de projets pilotes, de démonstration et de projets phares de l’OFEN, se tient à disposition pour toute information complémentaire à propos de ce projet.

Technologie

Tubes LED avec capteur radar

L’innovation de LEDCity repose sur des tubes LED usuels. Ceux-ci contiennent un grand nombre de diodes électroluminescentes (LED): 196 pour un tube LED d’une longueur de 1,5 m. La lumière ne provient donc pas d’un filament (ampoule) ni d’un gaz (tube fluorescent), mais elle est générée par un matériau semi-conducteur. À quantité de lumière égale (environ 3000 lm), les tubes LED ne consomment que 19 W, contre 53 W pour un tube fluorescent (40 W pour le tube fluorescent et 13 W pour le ballast). Les tubes LED sont disponibles dans différentes températures de couleur.

Les développeurs de LEDCity ont équipé les tubes LED d’un capteur radar capa­ble de détecter les mouvements avec une fréquence radio de 5,8 GHz dans un rayon d’environ 10 m. Le tube LED autonome est également équipé d’un capteur de luminosité. Il mesure la luminosité ambiante et règle l’intensité de l’éclairage de telle sorte que le niveau nécessaire soit atteint.

Auteur
Dr. Benedikt Vogel

est journaliste scientifique.

  • Dr. Vogel Kommunikation
    DE-10437 Berlin

Soutien

L’OFEN soutient des projets

La réalisation d’un tube LED autonome par l’entreprise LEDCity AG fait partie des projets pilotes et de démonstration, par le biais desquels ­l’Office fédéral de l’énergie (OFEN) soutient le développement de technologies énergétiques économiques et rationnelles, et encourage l’utilisation des énergies renouvelables. L’OFEN soutient des projets pilotes, de démonstration et des projets phares à hauteur de 40% des dépenses imputables non amortissables. Des requêtes peuvent être déposées ici à tout moment.

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