Un bateau historique à propulsion électrique
Mobilité électrique dans la navigation
Un petit bateau de ligne historique naviguant sur le Greifensee est devenu le premier bateau de Suisse alémanique à être équipé d’une propulsion électrique: en renonçant aux combustibles fossiles, il s’oriente vers une plus grande durabilité. Non seulement ses émissions de CO2 sont réduites de manière significative, mais il produit aussi moins de vibrations, ce qui rend les trajets plus agréables.
Le Greifensee est le plus grand lac situé entièrement dans le canton de Zurich. Il est connu pour ses rives non aménagées et pour l’absence de bateaux à moteur et électriques, dont la navigation est interdite sur ses eaux, à l’exception toutefois des bateaux de ligne et d’excursion ainsi que d’un petit bateau à moteur utilisé à des fins de recherches pour l’ETHZ. Parmi les navigateurs et les amis des zones naturelles protégées riches en espèces, le Greifensee n’est depuis longtemps plus un secret pour personne. Il n’est donc pas étonnant que ce lac idyllique accueille le premier bateau de ligne entièrement électrique de Suisse alémanique. Ce qui est toutefois surprenant, c’est qu’il s’agisse du «MS Heimat», un bateau historique datant de 1933, dont le moteur diesel a été remplacé par un moteur électrique doté de la technologie de batterie la plus moderne.
Shiptec et ZEM ont obtenu le contrat
Pour la réalisation de ce projet pilote respectueux de l’environnement, la coopérative de navigation Schifffahrts-Genossenschaft Greifensee (SGG) a reçu un soutien financier de la Confédération, du Canton, des communes et de particuliers. Après un appel d’offres public, le projet a été attribué à l’entreprise Shiptec, connue pour sa construction navale innovante – elle a déjà construit le bateau d’excursion MS Diamant et le catamaran de ligne MS Bürgenstock – ainsi qu’à l’entreprise norvégienne ZEM, spécialisée dans la conversion de bateaux à la propulsion électrique.
Pour fournir l’électricité nécessaire aux quelque 20 km de trajets quotidiens, ZEM et Shiptec ont équipé le MS Heimat d’un système de batteries lithium-ion de 99 kWh. Ces batteries Akazem sont, à l’origine, des batteries Akasol que ZEM a adaptées à des fins nautiques. Volvo, l’actionnaire majoritaire de ZEM, utilise ce type de batteries pour ses voitures. Le système nautique Akazem, qui a déjà fait ses preuves sur un grand nombre de petits navires et de ferries, dont des canots de sauvetage électriques pour l’industrie offshore et plus de 30 navires hybrides pour la pisciculture, fournira plus qu’assez d’énergie pour une journée moyenne d’exploitation de l’«e-MS Heimat». Il était prévu de recharger les batteries à 100% à partir de sources d’énergie renouvelables, y compris des panneaux photovoltaïques, mais il n’y avait pas assez de place sur la jetée de Maur pour cela, et il n’était pas possible d’installer des panneaux solaires sur le toit du navire pour des raisons de stabilité et de préservation de son authenticité historique extérieure. L’électricité provient donc de l’approvisionnement électrique de base de Maur et est composée à 100% de production hydroélectrique.
SGG et Shiptec ont eu besoin de composants robustes avec un niveau de sécurité élevé. «Cela correspond parfaitement aux valeurs de ZEM et à la conception de notre système », explique Sebastian Wang-Hansen, le chef de projet chez ZEM. Outre le système de batteries lithium-ion d’Akazem, Shiptec et ZEM ont choisi un moteur électrique de 40 kW de Danfoss Editron pour la propulsion. «Le moteur à aimants permanents fournit un couple élevé et est donc capable d’entraîner l’arbre d’hélice sans réducteur. Il en résulte un groupe motopropulseur plus léger, plus efficace et nécessitant moins d’entretien», souligne Sebastian Wang-Hansen.
La capacité de transport est restée la même
La transformation de l’oldtimer n’a pratiquement rien changé à l’utilisation du MS Heimat. Le bateau électrique a certes désormais un poids à vide de 11,0 t (auparavant 10,2 t), mais sa capacité de transport de 60 personnes, avec 20 passagers dans la cabine, est restée inchangée. La vitesse requise est toujours de 15 km/h, et le freinage d’urgence ne doit pas dépasser trois longueurs et demie de bateau, soit environ 5 m.
L’ensemble du système nécessite 85 kWh par jour et dispose d’une réserve de 10 kWh. Sont inclus dans ce calcul 14 courses régulières (ZVV) sur le lac et retour, deux trajets de transfert de Maur à Greifensee et retour ainsi qu’un trajet supplémentaire le soir à vitesse réduite. Pour parcourir un kilomètre, le bateau a besoin de 1,6 kWh.
Trois batteries de 33 kWh chacune ont été choisies, pour une capacité totale de 99 kWh. Une recharge pendant la journée est toutefois nécessaire. Il reste une bonne trentaine de minutes de recharge entre les rotations horaires. Avec une puissance de charge de 30 kW, il serait ainsi possible d’augmenter la charge de la batterie de 15 kWh ou de 15% (SOC, State of Charge) pendant ce laps de temps. La SGG exploite le système avec une puissance de charge de 12 kW.
«Il serait possible d’équiper le système avec deux batteries de 33 kWh chacune. Cependant, le choix de trois batteries offre un niveau de redondance plus élevé: si une batterie tombe en panne, on peut ainsi continuer à naviguer sans restriction avec deux batteries. De plus, nous espérons une plus longue durée de vie des batteries et une plus grande flexibilité lors de l’utilisation sur les bateaux. La variante avec trois batteries se présente comme une optimisation entre redondance, coûts et poids», explique Allen Fuchs, de la SGG, qui a suivi le projet depuis le début.
Réduction des émissions de CO2 d’environ 10 t/an
En mai 2022, l’e-MS Heimat a effectué son premier trajet à l’électricité avec passagers entre Maur et Uster. Avant cela, il a passé deux mois et demi au chantier naval de Lucerne pour remplacer le moteur diesel par un moteur électrique.
Les spécialistes se sont alors posé diverses questions: la stabilité du bateau est-elle maintenue même avec une charge plus importante? Ou encore: combien de temps peut durer un trajet d’un seul tenant? Si une réponse positive a déjà pu être apportée à la première question, la seconde attend encore une réponse. Un autre défi a été le choix de l’entreprise pour la réalisation de la mise à niveau. Ici, Allen Fuchs a délibérément choisi une entreprise qui avait déjà acquis de l’expérience dans la pratique, afin que l’acceptation par les autorités soit garantie.
Après sa transformation à Lucerne, le bateau a été ramené par l’autoroute dans son port d’origine. En guise de dernière étape avant sa mise en service sur le Greifensee: l’adaptation du logiciel au navire. Par exemple, l’arrêt d’urgence ne doit pas dépasser 52 m, ce qui nécessite de ralentir ou d’accélérer la commande, ou d’individualiser le logiciel.
Un pas a été fait dans la bonne direction, car «l’électrification de ce bateau de ligne doit permettre d’économiser à l’avenir dix tonnes d’émissions de CO2 par an», selon le chef de projet Allen Fuchs. Et la croisière sur le Greifensee produira moins de vibrations, sera plus silencieuse et donc, tout simplement, encore plus agréable.
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