Article Autoconsommation , Mobilité , Énergies renouvelables

Un aperçu de l’avenir

Démonstration du potentiel d’un microréseau électrique efficient

07.12.2023

Véritable laboratoire grandeur nature, le projet SunnYparc a pour objectif de démontrer le potentiel d’un microréseau lorsqu’il s’agit d’optimiser l’intégration de productions élec­tri­ques renouvelables dans l’approvisionnement éner­gé­ti­que d’un parc industriel. Un modèle qui préfigure la ville de demain.

Soutenu par l’Office fédéral de l’énergie et par le canton de Vaud, SunnYparc est un projet pilote impliquant cinq entreprises suisses, qui vise à explorer les synergies entre la production locale d’énergie renouvelable et la mobilité électrique. Celui-ci prévoit de mettre en place 250 bornes de recharge pour véhicules électriques d’ici fin 2025 sur le site d’Y-Parc, à Yverdon-les-Bains, et de les relier aux consommateurs industriels locaux par le biais d’un microréseau intelligent intégrant une importante production photovoltaïque (PV). L’objectif de ce projet consiste à démontrer que la recharge intelligente de ces véhicules – en particulier en exploitant la technologie «Vehicle-to-Grid (V2G)» et en privilégiant l’énergie photovoltaïque produite localement – a le potentiel de soulager la pression exercée sur le réseau électrique suisse.

Les 25 premières bornes de recharge ont été installées en 2022, au cours de la première phase du projet. Cinq d’entre elles sont bidirectionnelles et permettent donc de réinjecter une partie de l’électricité stockée dans les batteries des voi­tu­res vers le réseau.

Si ce processus semble simple en soi, il soulève de nombreux défis. Plusieurs ateliers ont par exemple été organisés afin de définir l’architecture de commu­ni­ca­tion entre les divers éléments du microréseau. Les tarifs possibles à appliquer entre les différents acteurs au sein de ce microréseau ont également été abordés. Enfin, des business cases ont été recherchés pour l’exploitation des véhicules via la technologie V2G, et ce, à travers différents mécanismes: autoconsommation, flexibilité locale et flexibilité nationale.

L’un des premiers résultats obtenus a consisté à identifier les défis à relever pour imaginer un business case qui soit attractif pour tous les différents acteurs nécessaires à l’exploitation du V2G.

Architecture de l’installation

Dans la première phase du projet, 25 bornes ont été installées afin de mettre en place les bases nécessaires au pilotage du microréseau. Ces 25 points de recharge – 20 unidirectionnels en courant alternatif (AC) et 5 bidirectionnels en courant continu (DC) – sont raccordés sur trois coffrets distincts. Ceux-ci sont équipés chacun d’un point de mesure d’énergie permettant de remonter les données de consommation/d’injection au serveur du système de gestion de l’énergie (energy management system, EMS) via une connexion Modbus RTU. Ces coffrets sont reliés les uns aux autres de manière à créer un réseau local centralisé, connecté au réseau mobile 4G en un seul point, et sont équipés du matériel nécessaire pour permettre la gestion des flux entre les véhicules et le microréseau SunnYparc.

Les bornes de recharge DC bidirectionnelles

Les bornes DC bidirectionnelles installées sont de type Eaton Green Motion DC 22. Trois d’entre elles sont équipées de connecteurs CCS et Chademo, ce qui permet un fonctionnement bidirectionnel dès à présent sur des véhicules Chademo tels que la Nissan Leaf. Les deux autres bornes, équipées uniquement en CCS, pourront permettre, via une mise à niveau, un fonctionnement V2G selon le protocole ISO 15118-20 qui devrait s’imposer dans un futur proche.

Ces cinq points de recharge DC sont raccordés sur un coffret 160 A intégrant les protections en courant fort, les interfaces en courant faible et les points de mesure d’énergie. La puissance disponible est suffisante pour que les cinq points de recharge puissent fonctionner de manière simultanée à pleine puissance, soit à un maximum de 110 kW.

Les bornes DC communiquent avec le système de gestion de l’énergie via une connexion Modbus TCP. L’EMS peut contrôler – pour les charges en Chademo – la puissance injectée ou consommée dans le réseau en temps réel, jusqu’à une valeur maximale de 22 kW en charge et d’environ 10 kW en décharge.

L’entreprise Smart Energy Link (SEL) est responsable de la mise en œuvre de l’EMS pour le projet SunnYparc. Le serveur SEL dédié à la gestion des bornes DC bidirectionnelles se situe dans le coffret électrique d’alimentation de ces bornes. Il permet à la fois de remonter les données de consommation et d’appliquer une valeur de consigne aux points de recharge.

Les bornes de recharge AC

Les bornes AC installées sont de type Eaton Green Motion Building, en version 22 kW socket T2. Elles sont réparties en deux grappes de 10 bornes paramétrées en 16 A triphasé (11 kW). Les 10 bornes de chaque grappe sont pilotées par une borne configurée en mode Master qui garantit que la puissance instantanée ne dépasse pas la limite du raccordement et assure un équilibrage des phases à 16 A.

Chaque grappe de 10 bornes est reliée à un coffret 80 A intégrant les protections en courant fort, les interfaces en courant faible et les points de mesure d’énergie. La puissance disponible est suffisante pour que les 10 points de recharge puissent fonctionner de manière simultanée à une puissance supérieure à la puissance minimale autorisée par les véhicules électriques, soit à un minimum de 5,5 kW/point.

Le raccordement à l’EMS est réalisé via une communication Modbus TCP. Cette connexion permet à l’EMS de définir une valeur dynamique pour la limite de puissance afin que le système puisse être asservi à une consigne de puissance dynamique. Cette fonctionnalité permet de définir le niveau de puissance consommée par chaque grappe de bornes AC.

Des test concluants

Outre les 25 bornes de recharge, la puissance photovoltaïque totale installée fin 2022, à la fin de la première phase du projet SunnYparc, s’élevait à 296 kW. L’ensemble de ces installations a produit 332 MWh d’électricité entre août 2021 et août 2022, soit un excellent productible associé de 1120 kWh/kW. À titre de comparaison, le productible moyen suisse est d’environ 900 kWh/kW.

Avec une valeur de 333 MWh sur la même période, la consommation annuelle des bâtiments du microréseau est équivalente à la production PV. Production et consommation n’étant pas parfaitement synchronisées, seuls 41% de la consom­ma­tion du microréseau ont été alimentés avec de l’énergie PV produite locale­ment. Par conséquent, 196 MWh ont été soutirés du réseau et 195 MWh ont été injectés au cours des 12 mois étudiés.

En l’absence de microréseau, le taux de consommation propre (mesuré indivi­duel­lement par bâtiment) s’élève à 17% sur la zone de desserte. La mise en place du microréseau permettrait donc de plus que doubler le taux de consommation propre dans l’état actuel. Ce taux pourra encore être augmenté en optimisant l’exploitation du réseau avec une gestion intelligente de l’infrastructure de recharge AC et V2G, mais aussi en utilisant des modèles de tarification dyna­mi­ques qui favorisent la consommation en cas de surplus de production à l’échelle locale.

Littérature complémentaire

M. Boccard et al., SunnYparc – Démonstrateur du potentiel d’un microgrid pour l’intégration optimisée de productions décentralisées et mobilité électrique du futur dans l’approvisionnement électrique d’un parc industriel, rapport intermédiaire, Office fédéral de l’énergie, 7 décembre 2022.

Lien

www.sunnyparc.ch


Les partenaires suisses du projet européen RegEnergy – Planair, Yverdon Energies et Eaton – ont permis de monter le projet SunnYparc. Celui-ci inclut également Smart Energy Link (SEL) ainsi que Virtual Global Trading (VGT).

 

Auteur
Mathieu Boccard

est chef de projets Systèmes énergétiques chez Planair.

  • Planair SA
    1400 Yverdon-les-Bains
Auteur
Adrien Dellinger

est chef de projet technique chez Eaton.

  • Eaton
    1052 Le Mont-sur-Lausanne

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