Quand la voiture devient source d’énergie
Les bénéfices de la technologie Vehicle to Grid
En 2024, grâce à la technologie V2G permettant la recharge bidirectionnelle intelligente en courant alternatif, la voiture électrique deviendra source d’économies pour les utilisateurs et d’énergie décarbonée pour le réseau. Une combinaison gagnante autant pour les propriétaires de véhicules électriques que pour la planète.
Si une borne domestique classique permet déjà de recharger sa voiture électrique quand l’énergie est abondante sur le réseau et donc moins chère, elle ne fonctionne que dans un sens: du réseau vers la voiture. Grâce à sa fonction bidirectionnelle, la technologie Vehicule to Grid, ou V2G, peut également réinjecter de l’électricité depuis la batterie du véhicule vers le domicile et le réseau, par exemple quand ce dernier est fortement sollicité. Avec le V2G, la voiture électrique devient un acteur du réseau électrique, contribuant à optimiser la consommation et la gestion de l’électricité. L’utilisateur, de son côté, peut réaliser de substantielles économies sur sa facture.
Une combinaison d’éléments
Quatre éléments sont indispensables à la mise en place d’un service de charge bidirectionnelle. Tout d’abord, le dispositif requiert un chargeur embarqué bidirectionnel intégrant la technologie V2G, qui sera disponible à partir de 2024 sur les futurs véhicules électriques de Renault. Une borne de recharge domestique bidirectionnelle, telle que la Mobilize Powerbox développée avec Software République, vient ensuite compléter l’installation à la maison. Il convient alors de souscrire un contrat d’électricité garantissant une électricité neutre en carbone et permettant de monnayer l’énergie restituée au réseau grâce au pilotage automatisé de la charge bidirectionnelle. Enfin, une application smartphone dédiée est indispensable pour programmer la charge bidirectionnelle.
L’utilisation est simple
Au quotidien, la technologie V2G et la charge bidirectionnelle sont faciles à utiliser. Ainsi, un propriétaire de véhicule électrique doté de la fonctionnalité V2G branchera son véhicule à sa borne de recharge domestique bidirectionnelle en indiquant sur l’application de son smartphone sa prochaine heure de départ et le niveau de charge désiré. Son contrat préalablement souscrit lui fournira une énergie neutre en carbone et la garantie d’un tarif préférentiel grâce à la programmation des heures de recharge. L’utilisateur pourra même visualiser les économies réalisées en temps réel sur son application smartphone. Dans le même temps, et sous réserve que la charge de la batterie ne descende jamais en dessous du niveau minimum défini, l’électricité stockée dans cette dernière peut être réinjectée dans le réseau électrique, par exemple lorsque celui-ci est soumis à une forte demande (figure 1). Et qui dit demande forte, dit tarifs plus élevés. L’électricité réinjectée dans le réseau ayant plus de valeur que celle qui a servi à charger la batterie, cela permet d’alléger la facture du propriétaire du véhicule de façon significative, jusqu’à 50%. Un autre avantage: cette électricité est non carbonée, au bénéfice cette fois de la planète.
Le véhicule électrique devient ainsi une véritable réserve d’énergie et une opportunité pour le réseau électrique. Il suffit de 30'000 véhicules utilisant la technologie V2G pour obtenir la puissance d’une centrale thermique de taille moyenne. Le V2G permet ainsi non seulement de réaliser des économies, mais contribue aussi au stockage d’électricité favorisant l’utilisation des énergies renouvelables.
Le choix du courant alternatif
Qui dit électricité, dit courant continu ou alternatif. S’il existe déjà depuis quelques années des bornes de recharge permettant la recharge bidirectionnelle en courant continu, Mobilize a pour sa part opté pour le courant alternatif. Ce choix est justifié par le contexte de la recharge. Avec le courant continu, la conversion se fait dans la borne. Avec le courant AC, elle se fait dans le chargeur embarqué du véhicule. Les bornes AC sont ainsi moins onéreuses que les bornes DC, et donc plus abordables pour les particuliers.
Le temps nécessaire à la recharge en courant alternatif est certes plus long qu’en courant continu, mais à domicile, les utilisateurs n’ont pas les contraintes d’une recharge rapide comme lors d’un long trajet sur autoroute. Ils rentrent chez eux, leur batterie est, par exemple, chargée à 50% et ils souhaitent disposer d’un niveau de charge de 80% le lendemain matin. Ils ont ainsi toute la nuit pour combler les 30% de charge manquante.
Les standards internationaux pour le V2G
La norme internationale ISO 15118-20 régit la charge bidirectionnelle des véhicules électriques et définit le protocole de communication entre le véhicule et la borne, essentiel au déploiement du service V2G. Associée au standard OCPP pour la communication entre la borne de recharge et les serveurs de pilotage, la norme ISO 15118-20 permet une cybersécurité optimale pour les échanges de données de la recharge bidirectionnelle entre le véhicule et le cloud.
Les services exploitant de manière commerciale ces technologies en sont pour l’instant à l’état embryonnaire et ne disposent pas encore d’une maturité garantissant la compatibilité des protocoles d’une manière industrielle sur le marché. La norme ISO 15118-20 a été publiée en 2022, et le document normatif décrivant les tests de conformité liés à cette édition est prévu en 2025. Le partenariat international d’entreprises du secteur de la mobilité électrique Open Charge Alliance (OCA) travaille sur la publication d’une spécification OCPP compatible V2X.
Lors de son lancement, le service V2G sera disponible pour les utilisateurs équipés d’un véhicule Renault et d’une borne Mobilize. Cette solution s’appuyant entièrement sur les dernières versions des standards, la compatibilité avec les futurs véhicules et bornes V2G d’autres fabricants viendra progressivement, grâce à des mises à jour logicielles.
La première d’une longue série
Attendue en 2024, la future Renault 5 électrique sera le premier véhicule de la marque à disposer de ce service de recharge bidirectionnelle (figure 2). Des composants électroniques et des logiciels spécifiques pour piloter la gestion du courant électrique y seront intégrés. Ce véhicule sera capable de fournir de l’énergie sous une forme équivalente à celle procurée par une prise de 220 V et pourra ainsi alimenter le réseau ou le domicile. Cette fonctionnalité sera également pratique pour passer l’aspirateur dans sa voiture, ou encore utiliser un barbecue électrique et organiser une fête dans son jardin grâce au V2L (Vehicule to Load) – un adaptateur branché à la prise de recharge du véhicule pour alimenter des appareils électriques domestiques.
Cela aura-t-il un impact sur la durée de vie de la batterie?
Avec le V2G, des cycles supplémentaires de charge et de décharge s’ajoutent aux phases normales de recharge de la batterie. Pour les modèles compatibles avec le V2G, ces cycles supplémentaires sont déjà pris en compte dans les modèles de vieillissement que Renault utilise pour vérifier la durabilité de la batterie. L’effet est minime, car les cycles de charge et de décharge provoqués par le V2G sont entièrement contrôlés: la plage SoC (State of Charge) autorisée pour le V2G et la vitesse de charge et de décharge (limitation de puissance) ont été définies de sorte à minimiser l’impact sur la batterie et à préserver sa santé. Pour preuve, le constructeur garantit les batteries qui utilisent le service V2G au même niveau que les batteries sans service V2G.
Les expérimentations du V2G
Le V2G a bien évidemment fait l’objet d’expérimentations au fil des ans. Cette technologie a été testée avec succès sur différents sites et pour divers usages, notamment à Porto Santo ou à Utrecht dès 2018. Plus récemment, le site de Belle-Île-en-Mer, en Bretagne, a été au cœur de nouvelles expérimentations confirmant les bénéfices du V2G. Six mois durant, un prototype de Renault Zoe à charge bidirectionnelle a été testé sur un site fonctionnant à l’énergie solaire. Ce véhicule, piloté par le système de gestion intelligente du microgrid, a stocké l’énergie et l’a réinjectée avec succès dans le réseau local. Cette étude visait à apprécier l’apport de la recharge réversible sur un réseau électrique local, en complément au système de stockage d’énergie. Son but était de maximiser l’utilisation de l’énergie solaire du site et de limiter le recours à l’électricité du réseau principal. Cette initiative s’est avérée fructueuse, confirmant les attentes de Mobilize, mais aussi des smart grids et des «Territoires d’innovation» – un programme déployé en France pour encourager l’innovation territoriale.
L’avenir du bidirectionnel
Le V2G sera disponible dès le lancement de la future Renault 5 électrique en 2024 en France et en Allemagne, puis en 2025 au Royaume-Uni. Un déploiement progressif aura ensuite lieu avec d’autres modèles du constructeur et dans d’autres pays.
D’ici la fin de la décennie, un chargeur embarqué bidirectionnel à très haut rendement verra le jour. Le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et Renault Group développent en effet un modèle plus performant, réduisant les pertes d’énergie de 30%: l’aboutissement de trois années de recherches et du dépôt de 11 brevets communs. Ce nouveau chargeur offrira de belles perspectives, puisque des dizaines de millions de véhicules électriques circuleront en Europe à l’horizon 2035.
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