Article Mobilité

Opérations de sauvetage et voitures électriques

Comment le savoir réduit les risques

29.05.2018

Certains médias présentent parfois les véhicules électriques comme étant particulièrement dangereux. En cas d’urgence, adopter un comportement adapté à ce type de véhicules est déterminant pour la sécurité des occupants et des pompiers. En complément à une formation spécifique, les cartes de secours peuvent aussi jouer un rôle important.

De temps en temps sont publiés des articles effrayants à propos d’accidents impliquant des voitures électriques. Ils relatent, par exemple, comment des secouristes doivent s’éloigner de véhicules en feu parce qu’ils ne «peuvent rien faire». Si l’on considère les dangers liés aux véhicules à propulsion alternative, au gaz naturel ou liquide, à l’hydrogène ou hybride du point de vue des secouristes formés, on constate que les risques sont tout à fait contrôlables. Si l’on dispose du savoir nécessaire et de l’équipement approprié et si l’on adopte un comportement adapté, les véhicules électriques ne représentent pas un danger exceptionnel pour eux.

Les véhicules à motorisation alternative ne sont pas vraiment dangereux pour les occupants non plus, puisqu’ils sont homologués et doivent satisfaire aux normes de sécurité correspondantes. Les dangers sont rarement liés à la technologie de transmission, mais souvent au style de conduite. Le pompier professionnel Michael Derungs, de la section Schutz & Rettung de la Ville de Zurich, souligne que les dangers en cas de conduite à grande vitesse sont particulièrement importants, les quantités élevées d’énergie provoquant des déformations impossibles à simuler lors de tests de collision, des déformations qui entravent parfois même le fonctionnement des mécanismes de protection intégrés. La technologie de transmission ne joue là qu’un rôle secondaire.

Selon Michael Derungs, les véhicules immatriculés à l’étranger et modifiés ultérieurement peuvent présenter des difficultés, car les exigences pour l’expertise y sont parfois moins strictes. Dans le trafic de transit, on rencontre des véhicules transformés sur lesquels certaines mesures de sécurité n’ont pas été installées, ce qui augmente le danger pour les passagers.

Comportement en cas d’incendie

En cas d’incendie, les conducteurs doivent respecter quelques règles fondamentales, quel que soit le type de transmission. Première règle: dans la mesure du possible, les conducteurs doivent conserver une carte de secours (fiche d’intervention) spécifique au modèle sous le pare-soleil côté conducteur. Ces cartes peuvent être téléchargées pour de nombreux modèles de véhicules récents sur le site tcs.ch ou sur le site Internet des fabricants. Elles indiquent aux secouristes où se situent les renforts de carrosserie susceptibles de représenter un défi pour les pinces de désincarcération et où se trouvent les batteries, airbags et autres composants critiques. Les secouristes ne doivent pas, par exemple, couper les câbles et autres composants sous haute tension par inadvertance. Les cartes de secours permettent ainsi une opération de sauvetage efficace et sécurisée.

Deuxième règle: lorsqu’il est possible de sortir d’un tunnel ou d’un garage avec un véhicule qui commence à brûler sans mettre quiconque en danger, les secouristes seront plus facilement en mesure d’assurer l’extinction et l’évacuation des occupants.

Troisième règle: lors du signalement d’un accident, il est utile de communiquer aux secouristes que la voiture est équipée d’une transmission alternative, de préférence avec indication du modèle du véhicule. Ils pourront ainsi mieux se préparer pour le sauvetage.

Un danger inconnu

Les voitures électriques accidentées peuvent représenter un danger moins connu: l’absence de bruit de moteur. En cas d’accident avec un moteur à combustion, celui-ci cale souvent et n’est plus dangereux. S’il tourne encore, cela s’entend et il suffit de l’arrêter. Avec les voitures électriques, le moteur peut par contre rester en marche après un accident mineur, même en cas d’incendie. Le système d’arrêt d’urgence automatique ne s’active qu’en cas de fortes collisions. Lors de l’évacuation d’une personne blessée, l’activation involontaire de la «pédale électrique» n’est pas exclue. La situation peut alors s’avérer dangereuse, aucun embrayage n’étant nécessaire et le moteur électrique développant immédiatement toute sa puissance. Même les cales usuelles en aluminium sont inutiles dans ce cas, car elles ne représentent pas un obstacle insurmontable pour ce type de véhicules. C’est pourquoi les voitures électriques doivent être immobilisées: avec le frein à main (si on le trouve, car l’époque où il se trouvait entre les sièges avant touche à sa fin) et en appuyant sur le bouton marche/arrêt ou en retirant la clé de contact. La marche à suivre pour les modèles individuels est décrite sur la carte de secours. Si toutefois il est impossible d’entrer dans le véhicule, celui-ci doit être bloqué avec de grosses cales ou de grosses poutres en bois au niveau de chaque roue. Il est également essentiel de sécuriser la zone d’intervention dans le cas où la voiture se libérerait.

Fumée et électrocution

Bien que les incendies des voitures conventionnelles génèrent aussi des gaz toxiques, ces derniers sont plus dangereux dans le cas des voitures électriques, car leur interaction avec l’eau utilisée pour l’extinction peut former de l’acide fluorhydrique. Or, les vapeurs de cet acide peuvent provoquer des lésions pulmonaires. Les secouristes doivent donc porter un masque de protection.

En principe, le risque d’électrocution en cas d’accident avec des voitures électriques est faible de par leur conception basée sur la sécurité. Avec le courant alternatif du secteur, il suffit de toucher la phase pour générer un flux électrique dangereux, car l’électricité passe alors à travers le corps humain pour rejoindre le sol. Avec le courant continu des véhicules électriques, en revanche, il faut fermer le circuit électrique de la batterie en touchant simultanément les pôles plus et moins, ce qui est très improbable.

Les secouristes ne doivent pas toucher la voiture sans gants de protection appropriés après l’extinction d’un incendie généralisé en raison du risque d’électrocution, les isolations ayant pu être consumées. En cas d’immersion du véhicule, l’absence de tension électrique dans l’eau doit être contrôlée.

L’eau est pratiquement toujours utilisée pour éteindre un incendie, que la voiture soit conventionnelle ou électrique.

Après l’extinction

Le suivi est très important après l’extinction d’une voiture électrique. Lorsqu’une batterie a été endommagée, le risque d’un court-circuit interne n’est jamais exclu. Celui-ci peut permettre à l’énergie accumulée de s’échapper et de provoquer un réchauffement ponctuel avec une augmentation continue de la température susceptible de provoquer un incendie (thermal runaway). C’est pourquoi les changements de température dans les batteries de véhicules accidentés sont observés avec une caméra thermique pendant une longue période et sont consignés. Le véhicule peut être restitué uniquement lorsque la stabilité thermique de la batterie est assurée.

Les entreprises de dépannage sont également formées en conséquence, car les mouvements de la batterie peuvent provoquer d’autres courts-circuits qui, si la batterie n’est pas déchargée, sont susceptibles d’aboutir à des incendies. Les secouristes transportent les véhicules dont la batterie est instable dans un dépôt sécurisé. Selon Michael Derungs, le traitement ultérieur de ces véhicules fait toutefois encore l’objet de recherches auxquelles participe également la section Schutz & Rettung.

En comparaison avec les voitures hybrides, les voitures purement électriques ont cependant l’avantage de ne pas être équipées d’un réservoir de carburant susceptible de représenter un défi supplémentaire en cas d’incendie.

Est-ce que haute tension signifie toujours haute tension?

On rencontre souvent des voitures électriques dites «haute tension». Ce terme est apparu dans l’industrie des véhicules pour différencier le système 12 V et le système 400 V nécessaire pour la transmission (des tensions plus élevées sont aussi possibles ici). Dans le cas des véhicules électriques, haute tension ne signifie pas systématiquement une tension élevée puisque les batteries haute tension présentent une tension continue de quelques centaines de volts. Celle-ci se situe donc encore dans le domaine des basses tensions, comme c’est le cas jusqu’à 1,5 kV pour les tensions continues. Les tensions électriques plus élevées sont qualifiées de hautes tensions, sachant que le secteur de l’énergie différencie encore la moyenne tension, la haute tension et la très haute tension.

 

Auteur
Radomír Novotný

est rédacteur en chef du Bulletin Electrosuisse.

  • Electrosuisse
    8320 Fehraltorf

Commentaire

deprez,

Bonjour, je suis sapeur pompier volontaire. Je comprends qu'il y a un risque d'électrocution en touchant une voiture électrique après extinction d'un incendie (par rupture possible de l'isolation du circuit électrique). Y a-t-il ce risque d'électrocution aussi en touchant l'eau d'extinction qui est en contact avec la voiture? Par exemple, il y a souvent un ruissellement d'eau de la lance sur le pompier pendant l'extinction qui peut faire un lien entre le véhicule et le pompier comme quelqu'un qui fait pipi sur une clôture électrique... Autre exemple, des pneus fondus par l'incendie, n'isolent plus le véhicule de l'eau d'extinction située au sol...
Vous remerciant pour votre attention, cordialement,

Nadège Deprez

Radomír Novotný,

Réponse au commentaire de Nadège Deprez du 24 avril 2023:

Je vous remercie pour ces questions !

En principe, un véhicule alimenté par sa propre batterie constitue un système électrique isolé et ne peut pas être comparé à une clôture électrique qui nécessite une connexion à la terre. Un contact unique, qu'il s'agisse d'un contact avec la main ou par le biais de l'eau d'extinction, est donc sans danger du point de vue électrique. Un tel contact ne pose aucun problème même si la voiture devait se trouver dans un ruisseau. L'eau d'extinction peut uniquement provoquer un court-circuit à l'intérieur du véhicule, pour autant que cela soit encore possible avec une voiture en feu. Ce n'est que si la voiture est encore branchée pour être rechargée que, dans certaines circonstances, on n'est pas séparé galvaniquement et que l'on a donc une connexion électrique avec la terre.

En revanche, un contact double, c'est-à-dire un contact des deux mains avec différentes pièces conductrices, est problématique si l'isolation est endommagée après l'incendie. On pourrait toucher des pièces qui sont sous tension et un courant continu dangereux pourrait circuler. Mais si, lors de l'extinction, les principes à suivre pour l'extinction d'éléments sous tension sont respectés, on se trouve du côté de la sécurité.

Pour information: des exposés spécifiques sont donnés sur ce thème à l'HFRB de Schutz & Rettung Zürich ainsi que des cours pratiques à la Fédération suisse des sapeurs-pompiers (www.swissfire.ch).

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