Le plein d’énergie verte dans la zone bleue
Installation de bornes de recharge à Bâle.
Le manque de stations de recharge a longtemps freiné la progression de l’électromobilité. Pour compléter les possibilités de recharge situées dans les bâtiments privés et sur les terrains commerciaux, Bâle est la première ville à miser sur la construction de bornes de recharge pour voitures électriques dans la zone bleue.
En Suisse, environ un tiers des émissions de gaz à effet de serre est généré par le trafic routier. Par conséquent, renoncer au moteur à combustion représente un levier important pour l’endiguement du problème climatique. On est encore loin de l’électrification complète de la circulation, mais la transition est en cours. La ville de Bâle, par exemple, compte environ 60'000 véhicules immatriculés. Parmi ces derniers, près de 400 véhicules entièrement électriques sont déjà en circulation et leur nombre devrait nettement augmenter à l’avenir. Pour atteindre cet objectif politique, le canton soutient financièrement les commerçants et les entreprises de taxi en cas d’acquisition de voitures électriques. Le premier groupe accepte l’offre de bon cœur – la subvention peut atteindre jusqu’à 5000 CHF par véhicule: six mois après le début du programme, environ 40 véhicules ont déjà été acquis.
Bâle voit une autre piste à suivre pour la promotion de la mobilité électrique dans l’expansion de l’infrastructure de recharge des véhicules électriques. Le fournisseur d’énergie de Bâle IWB exploite depuis un certain temps déjà des bornes de recharge sur des sites IWB accessibles au public et dans des parkings couverts. Cette offre est venue compléter les dispositifs de recharge privés installés dans les garages domestiques, grâce auxquels de nombreux propriétaires «faisaient le plein» de leur véhicule jusqu’à présent. «Toutefois, tout le monde ne dispose pas de son propre garage pour installer sa station-service électrique privée», explique Dominik Keller, directeur adjoint de l’Office de l’environnement et de l’énergie du canton de Bâle-Ville: «Le manque de bornes de recharge concerne particulièrement les 60% de la population de Bâle qui vivent en location et qui, la nuit, garent leur voiture dans les quartiers de la zone bleue.»
Un essai pilote confirme les besoins
C’est précisément ce groupe cible qui bénéficie depuis avril 2018 des dix bornes de recharge que Bâle a installées dans la zone bleue. Sept d’entre elles ont une puissance de 22 kW et trois autres, avec 50 kW, permettent notamment aux entreprises de taxi de recharger leurs véhicules très rapidement (figure 1). Comme l’indique une première évaluation, réalisée en juin 2019, de l’essai pilote qui s’étendra sur une durée de trois ans, l’offre est bien accueillie: l’utilisation des bornes de recharge a augmenté continuellement au cours de la première année, même si les sites présentent des différences considérables. Trois des dixvsites sont particulièrement bien exploités, alors qu’un quatrième ne rencontre qu’un succès modéré. Ce dernier se situe dans le quartier Bruderholz, qui présente une part de locataires relativement faible. Il est à noter que les places de stationnement équipées de bornes de recharge n’ont été que rarement occupées par des voitures conventionnelles et qu’aucun acte de vandalisme n’a été recensé.
Les dix places de stationnement équipées de stations de recharge et de capteurs situées dans la zone bleue sont marquées en jaune et destinées exclusivement aux véhicules purement électriques et aux véhicules hybrides rechargeables (figure 2). La durée de stationnement au cours de la journée est limitée à deux heures plus la demi-heure entamée (soit une heure de plus qu’habituellement en zone bleue) et illimitée la nuit et le weekend (figure 3). La réglementation appliquée jusqu’à présent incite les voitures à stationner sur les emplacements à 22 kW nettement plus longtemps qu’il ne serait nécessaire pour leur recharge. «Selon notre analyse, de l’électricité est effectivement prélevée pendant 12 à 20% de la durée de stationnement totale. En revanche, en ce qui concerne les bornes de recharge de 50 kW, payantes – une taxe d’utilisation de 0,08 CHF/min est facturée en plus du prélèvement d’électricité –, du courant est prélevé pendant 50 à 60% de la durée de stationnement», explique Patrick Wellnitz, directeur du service Développement chez IWB, l’entreprise qui exploite les bornes de recharge.
Expansion en fonction de la demande
Le réseau de recharge exploité par IWB dans la ville de Bâle comprend désormais 21 bornes de recharge, pour un total de 43 points de recharge, une station étant généralement dotée de plusieurs prises (figure 4). À titre de comparaison, selon l’annuaire des stations de recharge Lemnet.org, 2323 bornes de recharge étaient en service au début de l’année 2019 à l’échelle de la Suisse. En raison des expériences acquises dans le cadre de l’essai pilote, le canton de Bâle-Ville est déterminé à poursuivre le développement de l’offre de bornes de recharge en zone bleue. Suite à une décision du Grand Conseil attendue au printemps 2020, la société IWB devrait être mandatée pour l’aménagement de 200 places de stationnement supplémentaires dotées de bornes de recharge dans la zone bleue. Ainsi, environ 1% des 23'000 places de stationnement en zone bleue serait réservé aux véhicules électriques. Un point important: les nouvelles stations de recharge doivent être installées aux endroits où il existe une réelle demande. Aucune réglementation n’a encore été établie quant à la mise en œuvre concrète de ce principe. Selon les possibilités envisagées jusqu’à présent, il faudrait qu’un certain nombre d’intéressés, par exemple trois personnes, s’associent et demandent l’installation d’une borne.
La mise en place de nouvelles stations de recharge ne devrait, pour chaque cas, pas durer plus d’une année. Ce délai peut sembler long au premier abord, mais il est compréhensible si l’on considère que l’installation de chaque borne avec l’attribution de la place de stationnement correspondante nécessite une autorisation. Dans le cadre de la procédure d’autorisation, des questions telles que l’intégration de la station de recharge dans le paysage urbain, doivent être clarifiées. Une place de stationnement adjacente doit également être disponible pour que le deuxième point de recharge de la borne puisse être utilisé simultanément, si nécessaire. Les questions techniques, par exemple la faisabilité d’un raccordement au réseau d’électricité, doivent être clarifiées et la sécurité garantie. Les expériences acquises dans le cadre de l’essai pilote indiquent que les procédures d’autorisation pour de nouvelles bornes devraient être rapides. Aucun des dix points de recharge de l’essai pilote n’a fait l’objet d’une objection. Dominik Keller s’attend à l’installation d’environ cinq stations de recharge par an dans un premier temps.
Durée de la recharge
Une question de puissance
Plus une borne de recharge est puissante, plus la recharge d’une voiture électrique est rapide. Les bornes d’une puissance de 22 kW sont adaptées pour les sites où les utilisateurs disposent de plus de temps pour la recharge (par exemple pendant la nuit ou le travail). La recharge à 80% de la batterie de 41 kWh d’une Renault Zoé, par exemple, dure au moins 90 min. En revanche, les stations de 50 kW conviennent également à la recharge «de passage»: la recharge à 50% d’une batterie de 50 kWh d’une Nissan Leaf, par exemple, prend alors environ 30 min dans des conditions idéales. Le processus de recharge est encore plus court avec la borne de 150 kW qu’IWB a installée à l’automne 2019 à la sortie d’autoroute «Basel Ost/Breite».
Berne suit Bâle
«Nous saluons l’approche adoptée par le canton de Bâle-Ville. Le développement des possibilités de recharge pour les véhicules électriques dans la zone bleue suit la ligne de la Feuille de route pour la mobilité électrique 2022», déclare Stephan Walter, expert en mobilité à l’Office fédéral de l’énergie. Cette feuille de route a été signée en décembre 2018 par de nombreux représentants des secteurs de l’automobile, de l’électricité et de l’immobilier ainsi que par des représentants des pouvoirs publics. Sous la coordination de l’ancienne Conseillère fédérale Doris Leuthard, les représentants de 50 organisations et entreprises se sont mis d’accord sur l’objectif consistant à augmenter la part des nouvelles immatriculations de véhicules électriques et hybrides rechargeables à 15% d’ici 2022 et ont élaboré un large éventail de mesures en vue de sa réalisation. Le développement des possibilités de recharge à la maison et sur le lieu de travail, mais aussi sur le réseau routier urbain et les aires de repos et de service des autoroutes, y joue un rôle important.
À la mi-2019, le Conseil-exécutif de Bâle-Ville a adopté l’objectif stratégique de la feuille de route nationale dans son «Concept global en matière de mobilité électrique». Au cas où le développement de l’infrastructure de recharge n’aurait pas l’effet escompté, le gouvernement bâlois compte examiner d’autres mesures à partir de 2022 et, éventuellement, les mettre en pratique: par exemple la détermination de zones vertes, l’instauration de places de stationnements privilégiées pour les véhicules électriques, ou encore l’introduction d’incitations fiscales. Avec l’installation de bornes de recharge dans la zone bleue, Bâle endosse un rôle de pionnier en Suisse. Berne a récemment emprunté une voie similaire: en mai 2019, le fournisseur municipal d’énergie Energie Wasser Bern (EWB) a lancé un projet pilote de 18 mois avec deux stations de recharge en zone bleue. L’exemple pourrait faire école: en mars 2019, le Conseil national a approuvé une motion visant à rendre possible la création de «zones vertes» dédiées à la recharge de véhicules électriques, et ce, dans toute la Suisse.
Littérature complémentaire
Le «Concept global en matière de mobilité électrique» du Conseil-exécutif de Bâle-Ville est disponible ici.
Note
Cet article a été rédigé sur mandat de l’Office de l’environnement et de l’énergie de Bâle-Ville.
Région pilote Bâle
Vers un avenir plus durable
Une partie des subventions d’encouragement pour le développement de l’infrastructure de recharge de Bâle provient du projet «Société à 2000 W – Région pilote Bâle», grâce auquel le canton de Bâle-Ville a soutenu de 2001 à 2018 une centaine d’études et d’applications ayant trait au domaine de la durabilité. Depuis octobre 2017, Bâle-Ville dispose d’une nouvelle loi énergétique avec laquelle le canton continue son ambitieuse politique énergétique. Dès lors, le Conseil-exécutif poursuit, en tant que vision stratégique en lieu et place de la société à 2000 W, l’objectif de protection du climat suivant: d’ici 2050, les habitantes et habitants du demi-canton ne devront pas générer plus d’une tonne de CO2 par an.
Des informations complémentaires sur le projet «Société à 2000 W – Région pilote Bâle» sont disponibles ici.
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