Article Infrastructure

Le déploiement du réseau de fibre optique

Modèle de coopération

26.09.2022

Le développement de l’infrastructure de fibre optique en Suisse progresse lentement. Ceci contraste avec les besoins croissants de la population en réseaux de télécommunications rapides et sécurisés. Cette situation présente une véritable opportunité pour les fournisseurs d’énergie et pour les communes étant propriétaires de systèmes de conduites existants.

Aujourd’hui, la question n’est plus de savoir si une commune a besoin ou non d’un réseau de fibre optique, mais plutôt comment obtenir une infrastructure de télécommunications de pointe. Le besoin d’une infrastructure robuste assurant une transmission rapide des données est devenu crucial pour la population et les entreprises, d’autant plus depuis que la digitalisation s’est trouvée accélérée par la crise du Covid-19. En raison des évolutions sociales vers de nouvelles formes de travail à distance, les exigences en matière de vitesse et de volume de transmission de données ont considérablement augmenté. La conséquence : les volumes transmis explosent, les vitesses de transmission sont de plus en plus importantes et l’infrastructure est à la traine.

Quelle technologie pour le futur ?

Les anciens réseaux de cuivre de Swisscom et ceux des câblo-opérateurs arriveront bientôt à leur limite. Sous pression économique, ces acteurs devront se demander si un investissement important répété dans ces infrastructures vaut toujours la peine tandis que la technologie du futur est la fibre optique.

Chaque commune et chaque fournisseur d’énergie peut, en principe, espérer que l’un des principaux opérateurs de télécommunications construira un jour un réseau basé sur la fibre optique sur son territoire. Mais il n’est pas du tout certain que cela arrive en raison des contraintes de rentabilité, desdits opérateurs et de leur stratégie.

La commune ou le fournisseur d’énergie peut cependant également prendre en charge un tel projet. Car les services publics, grâce à leur infrastructure existante, sont dans une position unique pour permettre la mise en place d’un réseau de fibre optique à des conditions financières attractives.

Les méthodes de déploiement

Actuellement, différentes approches de construction de réseau en fibre optique sont envisageables :

• Fiber to the Home (FTTH) : raccordement à la fibre optique jusqu’au client final (logement/entreprise).
• Fiber to the Building (FTTB) : raccordement à la fibre optique jusqu’au point d’entrée au niveau du bâtiment. Les lignes de cuivre ou coaxiales existantes sont utilisées à l’intérieur de l’immeuble.
• Fiber to the Street (FTTS) : raccordement à la fibre optique jusqu’au chemin de câbles le plus proche. Les lignes de cuivre ou coaxiales existantes sont utilisées pour assurer la distance restante jusqu’au point d’entrée du bâtiment et l’intérieur de l’immeuble.
• Fiber to the Curb (FTTC) : raccordement à la fibre optique jusqu’au distributeur du quartier. Les lignes de cuivre ou coaxiales existantes sont utilisées pour assurer la distance restante.

Le modèle le plus évolutif reste le Ftth, à savoir le raccordement jusqu’à chaque logement ou magasin. Avec toutes les autres méthodes de raccordement, les fibres optiques ne sont pas tirées jusqu’au client final. Les données continuent à l’inverse d’être transportées sur le dernier kilomètre par des lignes de cuivre ou coaxiales plus faibles. La puissance du signal est progressivement atténuée sur ces lignes avec l’augmentation de la distance et de la longueur de la ligne, ce qui entraîne des vitesses beaucoup plus faibles chez le client final.

Différences considérables entre réseaux

La construction et l’exploitation d’un réseau de fibre optique est une entreprise des plus complexes : les travaux de planification et de préparation doivent être abordés avec soin afin que le maximum de bâtiments et d’appartements possible soient raccordés de manière efficace et durable. Ainsi, les activités de construction peuvent être minimisées et les travaux de génie civil inutiles peuvent à l’avenir être évités. Lors de la construction d’un réseau de fibre optique, la première étape consiste à définir la bonne méthode de déploiement : décider de tirer la fibre optique jusqu’au client final (Fiber to the Home, FTTH) ou pas (voir encadré).

Les différences au sein de la FTTH sont d’autres aspects technologiques à prendre en compte : la construction d’une FTTH en Suisse est actuellement réalisée à l’aide de différentes technologies. Les deux modèles connus sont le point à point (P2P) et le point à multipoint (P2MP).

Dans le modèle point à point (P2P) pur, l’unité d’utilisation (logement ou commerce) est directement raccordée à la centrale par des fibres optiques séparées. Chaque fournisseur de télécommunications du réseau peut ainsi exploiter la fibre optique jusqu’au client final et la sélectionner lui-même. La technologie pour le client final reste donc ouverte aux futurs développements FTTH. Même le populaire XGS-PON (réseau optique passif symétrique de 10  gigabits par seconde) peut être proposé sur le réseau P2P, sans aucune restriction. En outre, tous les clients finaux bénéficient d’une vitesse Internet maximale – synchrone, chargement (upload) et téléchargement (download) – ainsi que de la meilleure disponibilité, de la latence la plus faible et d’une excellente sécurité.

En revanche, le modèle point à multipoint (P2MP) n’a pas de fibre continue allant de la centrale jusqu’au client final. Un réseau P2MP ne comporte qu’une seule fibre sur le premier tronçon, de la centrale au dispositif d’alimentation (dans la rue ou l’immeuble) et à partir de ce point de distribution, la fibre entrante est répartie jusqu’à 32  clients finaux au moyen d’un répartiteur. Ainsi, dans le modèle P2MP, avec sa structure arborescente, seulement 1/32e de fibre arrive chez le client final, et il n’existe pas de fibre individuelle continue entre la centrale et un logement ou un commerce. Le P2MP n’est donc pas un « modèle à fibre unique ».

L’accès avec la couche 1 (fibre optique passive) est restreint dans le modèle P2MP pour les fournisseurs de télécommunications. Le modèle P2MP est sujet à interférences dans les connexions, car une arborescence P2MP entière (les 32  clients d’un fournisseur) est toujours affectée. Les fournisseurs de télécommunications des clients finaux individuels dépendent de la technologie P2MP choisie par le constructeur pour l’extension de la fibre optique, et le fournisseur doit s’y fier sans avoir lui-même la liberté de choisir.

Parmi ces différents modèles de construction, c’est la fibre optique de bout en bout ou point à point (P2P FTTH) qui présente de nombreux avantages : cette technologie de fibre optique permet les vitesses de transmission les plus rapides en chargement et téléchargement. Elle permet ainsi l’échange de gros volumes de données sans délai, et représente la seule technologie d’avenir pour l’utilisation de bandes passantes illimitées pour toute la population.

La campagne ne coûte pas plus cher que la ville

Les coûts de construction font partie des autres critères importants pour les décideurs des entreprises locales d’approvisionnement en énergie. La construction d’une nouvelle infrastructure de fibre optique a un coût non négligeable, critère de poids pour les décideurs. Cependant, il existe de grandes différences de financement qui déterminent le succès ou l’échec d’un projet.

Les idées reçues vont bon train, et on parle souvent d’une fracture ville-campagne. La teneur: dans les villes à forte densité, le déploiement de la fibre optique sur l’ensemble du territoire jusqu’aux habitations et aux locaux commerciaux est pertinent, ce qui n’est pas le cas dans les zones de campagne.

Bien plus que de la question « ville ou campagne ? », la construction d’un réseau de fibre optique dépend de la planification et de la construction adaptées, du déroulement des processus adéquats et de la collaboration avec toutes les parties intéressées.

Le nombre de travaux de génie civil nécessaires entre la centrale et les armoires de distribution dans les bâtiments est un facteur décisif pour la construction d’un réseau de fibre optique. Plus les systèmes de conduites existants peuvent être utilisés, plus le déploiement sera rentable. Dès lors, un partenariat entre communes, cantons ou coopératives et un investisseur prudent représente une solution optimale à des coûts tout à fait abordables.

De la nécessité de la fibre optique à tous les étages

Les raccordements internes (généralement du sous-sol vers les unités d’habitation et commerciales au rez-de-chaussée ou à l’étage) représentent le deuxième facteur de coût majeur. L’argument souvent avancé est qu’il ne vaut pas la peine de raccorder des immeubles comportant peu d’unités d’utilisation jusqu’aux appartements et locaux commerciaux. Ceci n’est pas correcte. Car la situation peut s’avérer différente, si vous planifiez correctement et mettez en œuvre le raccordement de tous les appartements ou locaux commerciaux à partir d’une source unique dans la phase de déploiement. Vous construirez ainsi plus efficacement et proposerez une offre qui est immédiatement disponible pour les clients. Un aspect qui rend le réseau plus attractif pour les clients potentiels.

Dans beaucoup de modèles de construction, le raccordement interne n’a lieu que si une demande a été faite par le client final. Le raccordement BEP-ready (fibre optique jusqu’à la cave au sous-sol, boîtier de raccordement de l’immeuble) n’est alors étendu vers les appartements ou les locaux commerciaux que lorsqu’un client s’abonne à un service de télécommunications. Mais dans un tel cas, le câblage interne, y compris l’installation de la prise OTO, est réalisé. Avec ce type d’installation, les équipes de construction et les installateurs doivent intervenir plusieurs fois sur site, entraînant ainsi des coûts additionnels élevés. Les clients finaux doivent également attendre plusieurs semaines avant que le raccordement en fibre optique soit finalisé. Les coûts supplémentaires peuvent être 30 à 40 % plus chers par rapport à un aménagement complet prévu dès le départ.

Le raccordement en maison individuelle n’est, lui non plus, pas plus cher. Dans les maisons individuelles ou les petites résidences, plus fréquentes en milieu rural, les colonnes montantes internes sont généralement plus faciles d’accès depuis le sous-sol. Il suffit généralement de monter un seul étage pour atteindre le logement grâce à un raccordement interne. Cette configuration est nettement plus efficace à mettre en œuvre que le nouveau câblage interne via des colonnes montantes sur plusieurs étages. La coordination des délais avec plusieurs locataires est également un facteur de coûts. Le raccordement de maisons individuelles n’est donc pas plus coûteux que celui de grands immeubles.

La qualité des partenariats au centre de la réussite d’un projet

Les réseaux de fibre optique sont des projets coûteux et exigeants tant en termes de technologie que de planification. La collaboration avec différents groupes d’intérêt et une répartition claire des tâches sont dès lors essentielles. Avec le modèle de partenariat Swiss4net, l’entreprise prend en charge l’intégralité du financement, et de l’exploitation ultérieure du réseau FTTH P2P, offrant une offre complète, sans encombre. Le fournisseur d’énergie, quant à lui, soutient l’expansion en mettant à disposition l’infrastructure de conduites, un savoir-faire spécifique ou encore des contacts avec d’autres groupes d’intérêt liés de la commune.

La situation sur site relative aux capacités des conduites disponibles et utilisables est également décisive. Les projets d’extension doivent donc être particulièrement bien planifiés. L’extension systématique jusqu’aux appartements ou aux locaux commerciaux dans tous les bâtiments doit également être prévue dès le départ. Une parfaite analyse de la faisabilité selon la situation est nécessaire et permet d’assurer un déploiement efficace. Si ces conditions sont remplies, de nombreuses communes et fournisseurs d’énergie peuvent accéder à un réseau de fibre optique de pointe. Et cela, sans risques majeurs et investissements propres.

Romande Energie et Swiss4net coopèrent

Romande Energie et Swiss4net, qui ont déjà financé et construit différents réseaux FTTH en Suisse, planifient conjointement l’extension de différents réseaux de fibre optique dans plusieurs communes sur l’arc lémanique. d’ici deux à trois ans, la ville de Morges disposera d’un réseau de fibre optique point à point FTTH (OTO Ready for Service) couvrant l’ensemble de son territoire avec environ 10 000 raccordements. Le projet est mis en œuvre dans le cadre d’un partenariat à long terme entre Romande Energie et Swiss4net. Cette dernière finance la construction du réseau FTTH et en assure la construction avec Romande Energie dans les conduites existantes. Le réseau sera alors exploité sous le nom de Morges4net  SA (filiale de Swiss4net). D’autres réseaux dans les communes situées autour du Léman sont en cours d’extension grâce à cette coopération.

Swiss4net construit et exploite tous ses réseaux FTTH sur l’ensemble du territoire selon le modèle P2P avec 4 fibres par unité d’utilisation. Grâce à cette configuration, tous les clients finaux reçoivent leurs propres fibres, et les fournisseurs de télécommunications peuvent utiliser les réseaux de manière équitable. Grâce au modèle de financement de Swiss4net, les coûts de construction sont supportés par Swiss4net, et les fournisseurs d’énergie (communes, cantons, coopératives) perçoivent des revenus pour l’utilisation des systèmes de conduites.

Auteur
Roger Heggli

est PDG de Swiss4net Holding SA.

  • Swiss4net Holding SA, 6300 Zoug

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