La formation face aux défis de l’électronique
Répondre au manque d’ingénieurs
Entre pénurie et enjeux environnementaux ou géopolitiques, voilà plusieurs mois que l’énergie électrique se trouve au cœur de l’actualité. Mais aujourd’hui, parler d’électricité, c’est aussi parler d’électronique, tant nos systèmes électriques dépendent de ces dispositifs. Or, la Suisse connaît depuis quelques années une baisse du nombre d’ingénieurs HES dans ce domaine.
Confrontés quotidiennement aux problématiques liées au domaine de l’électrotechnique, les professeurs de la filière Génie électrique de la HEIG-VD (Haute école d’ingénierie et de gestion du canton de Vaud) sont particulièrement sensibles au manque d’ingénieurs et d’ingénieures HES (hautes écoles spécialisées) dans ce domaine, et s’inquiètent des conséquences pour l’avenir. En effet, le nombre d’étudiants inscrits dans cette filière diminue. Et les besoins se multiplient…
Un contexte volatile
Il y a à peine deux mois, la Commission fédérale de l’électricité annonçait une «forte augmentation des prix pour les ménages suisses en 2023», atteignant 261 CHF par année en moyenne. Cette augmentation découle, entre autres, des difficultés d’approvisionnement en gaz, mais aussi de l’incertitude concernant la disponibilité des réserves hydrauliques ainsi que de la survenue d’une potentielle sécheresse.
Après la confiance affichée par la Suisse en 2019, lorsqu’elle a décidé de dépasser les objectifs de l’Accord de Paris et de viser la neutralité carbone dès 2050, 2022 aura eu l’effet d’une douche froide, au sens propre comme au figuré, dévoilant sans égards les négligences du pays à plusieurs niveaux. En effet, les crises récentes, qu’elles soient énergétiques ou sanitaires, révèlent la vulnérabilité de la Suisse face à des facteurs géopolitiques et climatiques ainsi que ses lacunes, et rappellent l’importance de disposer de ressources propres, tant matérielles qu’intellectuelles.
Les défis de l’électronique
Dans ce contexte, le sujet de l’électronique peut sembler secondaire, mais il fait pourtant partie de la même conversation. Les principes et dispositifs électrotechniques sont intégrés à la plupart des systèmes électriques. Ils sont donc omniprésents dans des domaines importants comme l’énergie, la digitalisation ou l’automatisation. Le rôle d’un spécialiste en électrotechnique consiste à répondre aux défis actuels et futurs posés par ces dispositifs, ainsi que de maintenir et développer les compétences et technologies clés requises par les entreprises.
Or, la Suisse fait face à une pénurie d’ingénieurs HES en électrotechnique [1] et notre tissu industriel en manque cruellement, ce qui compromet notre capacité à répondre aux défis électrotechniques à venir. Afin d’éviter de connaître le même type de crise dans le champ de l’électronique que dans celui de l’approvisionnement électrique, il est essentiel d’anticiper et de corriger ces lacunes. Le développement de ces domaines doit être, et rester, une préoccupation majeure: c’est la condition du maintien de notre qualité de vie et de notre prospérité.
Entre défis et opportunités
Pour l’optimiste, les manques sont des opportunités déguisées en vides. À travers l’abondance des offres d’emploi, la crise énergétique actuelle révèle les besoins en ressources humaines, notamment au niveau de l’ingénierie HES. Les défis à relever dans le secteur de l’électrotechnique sont ainsi garants d’un avenir riche et passionnant pour toute personne intéressée à se former et à travailler dans le domaine du génie électrique.
La formation proposée par la HEIG-VD, par exemple, permet d’approfondir la matière et de mieux comprendre le fonctionnement de ce qui est mis en œuvre dans le vaste monde de l’électrotechnique. Elle ouvre des perspectives intéressantes en matière d’activités de recherche et développement, de gestion de projets ou d’évolution de carrière, en général. Un titre de Bachelor HES offre enfin l’accès à une formation de niveau Master et, par la suite, même à un doctorat.
Les débouchés sont donc vastes. Ils touchent aux domaines de l’énergie et de l’électronique, bien sûr, mais aussi de l’automatisation ou encore de l’informatique industrielle. La palette d’activités s’étend de celles d’un ingénieur responsable de production ou de produits – dans une PME ou une grande entreprise –, à celles d’un ingénieur spécialisé en recherche et développement, qui pourra par exemple travailler dans l’élaboration de nouveaux moyens de transport, tels que les systèmes «hyperloop». La voie est également ouverte à un développement de carrière, avec des postes à hautes responsabilités tant au niveau national qu’international.
Des compétences adaptées aux besoins du marché du travail
Avant d’en arriver là, les personnes qui étudient dans la filière Génie électrique de la HEIG-VD doivent suivre une formation en tronc commun, après laquelle elles choisiront l’une des trois spécialisations proposées. Cela leur permet d’acquérir des notions solides dans des disciplines de base telles que les mathématiques, la physique, l’électrotechnique, l’électronique et l’informatique. Cette formation est indispensable pour pouvoir accéder à des compétences plus pointues, comme le traitement des données et le «machine learning» (ou intelligence artificielle), la régulation automatique et l’électromécanique.
À la suite de cela, le futur ingénieur aura le choix entre trois orientations, qui reflètent différents champs de métiers existants. L’un des avantages d’étudier dans une HES tient en effet à un enseignement alliant connaissances théoriques de pointe et proximité avec le monde professionnel, notamment grâce à un corps professoral fortement investi dans la recherche et l’innovation. Les futurs ingénieurs acquièrent ainsi des compétences adaptées aux besoins du marché du travail et disposent d’excellentes perspectives.
Trois orientations pour des formations professionnalisantes
À la HEIG-VD, l’orientation «Systèmes énergétiques» se concentre sur la production, la distribution et l’utilisation efficace de l’énergie électrique. Cette formation a pour vocation de former les ingénieurs dans les domaines des réseaux électriques, de l’électronique de puissance et des machines. Les personnes issues de cette formation sont appelées à développer des solutions innovantes et respectueuses de l’environnement, en appliquant les méthodes d’analyse, de modélisation, de simulation et de synthèse à l’étude des procédés énergétiques et électriques, en général.
Le champ d’application couvert par l’orientation «Électronique embarquée et mécatronique» est large: il s’étend du domaine biomédical à celui des transports, en passant par les machines industrielles et l’électronique de loisir. Les personnes diplômées de cette orientation seront en mesure de concevoir, réaliser et mettre en production des systèmes électroniques pour une grande variété d’applications et de fonctions sophistiquées telles que le traitement de l’information par microprocesseurs ou la coordination des machines de production.
Finalement, l’orientation «Électronique et automatisation industrielle» répond aux exigences de l’industrie dans le domaine de l’automatisation. La personne diplômée de cette formation sera capable de développer et d’intégrer des technologies de pointe, aussi bien pour l’automatisation que pour la vision manufacturière, la robotique ou, plus largement, l’informatique. Son savoir-faire lui permettra de concevoir et de développer des systèmes de commande sophistiqués et à haute performance pour les machines et équipements de demain, conditionnés par l’Industrie 4.0.
Audace, innovation et entrepreneuriat
La HEIG-VD se démarque par un engagement fort en faveur de l’innovation. Son cœur de mission comprend en effet l’enseignement, mais aussi la Ra&D (recherche appliquée et développement), qui favorise et encourage le transfert de savoirs en produits et services à haute valeur ajoutée. Par la transmission de connaissances enrichies d’avancées théoriques autant que d’exigences professionnelles, la haute école prépare ses étudiants à penser le monde de demain.
Cet engagement prend également la forme d’un soutien à l’entrepreneuriat. La «Fabrik» notamment, véritable pré-incubateur de start-up, vise ainsi à accompagner les innovateurs de demain. En 15 ans, la HEIG-VD a soutenu de nombreuses initiatives entrepreneuriales. Elle a d’ailleurs publié un livre revenant sur certains de ces parcours à travers des portraits et regards croisés avec la photographe Sarah Carp [2].
Des intérêts concordants
Que ce soit dans l’entrepreneuriat ou dans des parcours a priori plus classiques, les personnes diplômées de la filière Génie électrique disposent en général d’excellents débouchés. Elles se retrouvent ainsi à occuper souvent des postes à hautes responsabilités.
Tout le monde ne vise cependant pas le sommet de la hiérarchie, et le succès des alumnis peut prendre des formes diverses. À ce titre, les programmes d’échanges internationaux, les stages en entreprise, les travaux de Bachelor, les événements autour de l’innovation, les conférences, etc. constituent des plus-values claires et viennent enrichir cette formation. Les activités de Ra&D et la proximité avec le monde professionnel assurent également une bonne adéquation entre les filières de Bachelor et les réalités du monde.
De cette manière, les défis d’aujourd’hui et de demain, ainsi que les besoins en génie électrique et en électronique, peuvent bel et bien se présenter comme l’occasion pour la Suisse de démontrer son savoir-faire et son expertise. L’essentiel reste de mettre en place et d’assurer les moyens pour que chacun et chacune trouve son compte, et d’offrir les possibilités aux générations futures d’explorer des domaines riches en enseignements et en opportunités.
Références
[1] Guido Santner, «Pénurie d’ingénieurs HES en électrotechnique», Bulletin SEV/VSE 4/2022, p. 22-25, 2022.
[2] L’art d’entreprendre – 10 start-up, 17 entrepreneurs, 15 ans de soutien, une publication de la HEIG-VD, décembre 2022.
Remerciements
L’auteur tient à remercier sincèrement Aurélien Balif, rédacteur à la HEIG-VD, pour le précieux travail qu’il a effectué lors de la rédaction de cet article.
Portes ouvertes de la HEIG-VD
Le vendredi 3 mars 2023, de 14 h à 19 h, sur le Campus de Cheseaux.
Commentaire