Interview Capteurs , Hardware , Internet des objets

Des milliers de milliards à notre service

Défis et tendances dans le monde des capteurs

02.10.2017

Expansion de l’Internet des objets, développement de la robotique, monitoring de l’environnement, télémédecine: les capteurs ont un bel avenir devant eux. D’ici à quelques années, leur production mondiale devrait s’élever à plusieurs billions d’unités par an. Le Bulletin est remonté aux sources et a rencontré Nico de Rooij, l’un des pionniers du domaine.

Bulletin: Le nombre de capteurs produits par année ne cesse de croître. Quelles seront à l’avenir les applications qui en nécessiteront le plus?

Nico de Rooij: Dans un premier temps, une forte demande proviendra certainement du secteur de la robotique. Les robots auront besoin de centaines, voire de milliers de capteurs, ne serait-ce qu’au niveau de leur peau pour reproduire le sens du toucher. Beaucoup de travaux sont aussi effectués pour le secteur de l’alimentation. L’objectif consiste ici à remplacer les dates de péremption par l’intégration dans les emballages de capteurs évaluant la fraîcheur des aliments. Ceci permettra de réduire considérablement la quantité de nourriture détruite chaque jour par mesure de précaution. Pour ce type d’application, il faudra toutefois encore patienter 5 à 10 ans avant d’atteindre l’étape de la commercialisation.

Quelles sont les tendances actuelles?

Différents travaux de recherche sont, par exemple, réalisés en vue du développement de l’Internet des objets. Il reste encore divers problèmes à résoudre, que cela soit au niveau de la communication entre les capteurs, de la réduction drastique de leur consommation énergétique ou de la récolte d’énergie dans leur environnement direct.

Faudra-t-il développer de nouvelles technologies pour produire des billions de capteurs par année?

Pour de tels volumes, il ne sera en effet plus possible de se limiter uniquement à la technologie du silicium. La plupart des capteurs seront produits par impression «roll-to-roll» (rouleau à rouleau) sur des polymères ou des plastiques. Mais le silicium restera incontournable pour les applications plus exigeantes, telles que les puces des processeurs ou les caméras des smartphones.

Quels sont les défis que les capteurs devront encore relever?

Les capteurs physiques tels que les accéléromètres ou les gyromètres sont arrivés à maturité depuis un certain temps déjà. Il reste par contre encore des développements à faire dans le secteur des capteurs chimiques environnementaux, par exemple les capteurs de gaz tels que le NOx, le CO ou le CO2 dans l’atmosphère, ainsi que les capteurs de pH, de phosphates et de métaux lourds destinés au monitoring des cours d’eau. Ils doivent actuellement encore être nettoyés et recalibrés régulièrement pour garantir leur fiabilité, ce qui nécessite l’intervention de spécialistes.

Au cours de son histoire, votre laboratoire a développé une multitude de capteurs, d’actionneurs et de microsystèmes destinés à différents domaines d’applications. Y a-t-il un secteur qui vous tienne particulièrement à cœur?

Au vu de la situation géographique de Neuchâtel, j’ai particulièrement apprécié notre collaboration avec l’industrie horlogère, l’un des trois secteurs d’exportation suisse les plus importants. Au cours de la dernière décennie, nous avons notamment pu fournir aux fabricants de montres des spirales et des roues d’échappement en silicium réalisées à l’aide de la gravure profonde, ce qui leur permet d’exploiter les propriétés mécaniques exceptionnelles de ce matériau.

 

Auteure
Dr. Cynthia Hengsberger

est rédactrice du Bulletin Electrosuisse.

  • Electrosuisse,
    8320 Fehraltorf

En quelques mots

Figure emblématique de la technologie du silicium et des MEMS (microsystèmes électromécaniques), Nico de Rooij jouit depuis 2016 d’une retraite bien méritée. Originaire des Pays-Bas, il a rejoint l’Université de Neuchâtel en 1982 en tant que professeur ordinaire. Il y a notamment fondé et dirigé le Laboratoire de capteurs, actionneurs et microsystèmes. Ses domaines de recherches se sont étendus des accéléromètres et capteurs de pression aux capteurs chimiques et biologiques les plus variés, en passant par toute une palette de microsystèmes optiques, de sondes pour les microscopes à force atomique, mais aussi de composants pour l’industrie horlogère. Certains des systèmes développés dans son laboratoire ont participé à des missions scientifiques dans l’espace et sur Mars. Parallèlement à ces activités, il a été chargé de cours à l’ETHZ, vice-président du CSEM et directeur de l’Institut de Microtechnique de l’EPFL.

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