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Au musée!

La plume politique 10/2018

12.09.2018

Comme par hasard, c’est justement un conseiller fédéral grison qui a déclaré: «Un canton peut estimer convenable d’exiger une redevance hydraulique la plus élevée possible, voire prohibitive, sans égard pour le développement de notre force hydraulique. Les intérêts économiques s’en trouvent toutefois largement entravés. L’intérêt économique consiste à exploiter ce bien national qu’est notre hydraulique aussi rapidement et rationnellement que possible et de le mettre de plus en plus à profit de toute la population.»

En 1915, il était évident pour le conseiller fédéral Calonder que la Loi sur les forces hydrauliques ne devait aucunement consister à plumer l’hydraulique. Au contraire: le législateur prévoyait expressément que la redevance hydraulique «ne doit pas grever sensiblement l’utilisation de la force», et la plafonnait dans l’intérêt de l’exploitation de la force hydraulique. Depuis, il revient aux cantons de fixer le montant effectif de la redevance hydraulique dans la limite de ce plafond. Seul problème: le plafond de la redevance hydraulique est épuisé presque partout en Suisse, sans égard pour l’esprit de la réglementation ni pour certains droits constitutionnels.

Le principe de proportionnalité et la garantie de la propriété auraient dû mener depuis longtemps à une baisse de la redevance hydraulique, celle-ci représentant près d’un quart des coûts de revient moyens de l’hydraulique. De plus, ces dix dernières années, un énorme fossé s’est creusé entre la redevance hydraulique et le prix de l’électricité. La redevance hydraulique est manifestement disproportionnée par rapport à la valeur commerciale de l’utilisation de l’eau, grevant ainsi sensiblement la force hydraulique – justement ce que la loi entend éviter. Dans sa forme actuelle, la redevance empiète en outre sur les droits de propriété acquis par le biais de la concession, ces droits incluant notamment une certaine rentabilité. Légitimement, une redevance hydraulique ne peut être due que lorsque cette rentabilité minimale peut être atteinte.

Après cent ans, il est clair que la réglementation rigide de la redevance hydraulique ne fonctionne pas et qu’elle ne fait pas honneur à la réflexion d’origine de ceux qui l’ont créée. Il est grand temps de passer à une redevance hydraulique flexible, avec une part fixe et une part variable – d’autant plus que le modèle flexible présenté par le Conseil fédéral lors de la consultation a été très bien accueilli. Le plafond fixe pour la redevance hydraulique a fait son temps et sa place est définitivement… au musée!

50 secondes pour une hydraulique forte

Auteur
Dominique Martin

est responsable affaires publiques de l'AES.

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